Iris germanica L.



Iris germanica de Fuchs
Gravure de 1542 légendée Iris germanica
Fuchs, Historia Stirpium, planche 317.
Iris germanica
Iris germanica L.

Le nom Iris germanica est largement employé - à tort - par les amateurs de jardins pour désigner les iris communément cultivés, les iris du groupe Barbata.

Iris germanica L. est en fait le nom d'un iris précis, connu en Europe depuis des siècles. Cet iris est stérile et propagé par l'homme.

Plus récemment cet Iris germanica au sens strict de Linné a été réuni - par certains botanistes - et peut-être à tort - avec des iris sauvages, fertiles, considérés jusqu'ici comme espèces distinctes.

Origine du nom

L'emploi du nom Iris germanica - iris d'Allemagne - remonte au moins à la Renaissance.

Le botaniste allemand Leonhard Fuchs désigne ainsi en 1542 l'iris de son Historia Stirpium (pp 316-8). Il en donne aussi un dessin d'après nature (ci-contre).

La liste des noms botaniques de la Renaissance a été colligée par Caspar Bauhin dans le "Pinax", publié en 1623. On y trouve de nombreux synonymes de l'iris de Fuchs : germanica n'était qu'un nom parmi d'autres. Bauhin lui même rebaptise cet iris "Iris vulgaris germanica sive sylvestris" (iris commun d'Allemagne ou sauvage). [Cette liste des noms d'iris (pages 30 à 34) montre également de nombreux homonymes : divers auteurs utilisent "germanica" pour d'autres espèces.]

Le nom germanica, devenu d'usage habituel, est naturellement repris par Linné, notamment dans le "Species Plantarum" de 1753. Comme pour chaque espèce, Linné y cite Bauhin, établissant ainsi une synonymie de son Iris germanica avec l'Iris vulgaris germanica de Bauhin et par suite avec les auteurs de la Renaissance cités par Bauhin.

Un siècle après Linné, les botanistes consolident les règles de la nomenclature botanique : Chaque espèce portera le premier nom qui lui a été donné ; mais on fixe à la nomenclature moderne une date de départ à mai 1753 (date du Species Plantarum), les noms "pré-linéens" n'étant donc pas pris en compte. L'appellation de notre iris est donc, depuis lors : Iris germanica Linné 1753 ou, en abrégé : Iris germanica L.

Description

Cet iris a la morphologie générale des iris rhizomateux barbus.

Son rhizome horizontal à demi enterré mesure environ 2-3 cm de diamètre. Il s'allonge par l'extrémité, qui porte feuilles et hampe florale, et forme latéralement de nouveaux points de croissance, à l'origine de ramifications.

Les feuilles "en glaive", pointues, légèrement courbes, sont disposées en éventail. Elles mesure 30 à 50 cm de longueur par environ 3-4 cm de largeur. Elles sont légèrement glauques et ont une fine marge scarieuse. Les feuilles sont persistantes l'hiver (contrairement à d'autres espèces et hybrides).

La hampe de 50-80 cm est ramifiée et porte généralement 3 à 5 fleurs. La hampe porte quelques feuilles réduites, plus grandes à la base (I. aphylla, de Savoie, n'en a pas). Les bractées des boutons floraux sont vertes à la base et sur au moins la moitié de leur longueur, scarieuses au sommet (entièrement scarieuses chez I. pallida). Elles peuvent être teintées de rougeâtre.

Fleurs : Les 3 tépales externes (~ sépales), qui portent une barbe souvent blanche à pointe jaune, sont presque pendants, à peine étalés. Environ 10 par 6 cm. Les sépales sont étroits à la base et s'élargissent progressivement, atteignant leur largeur maximale non loin de l'extrémité, qui peut-être échancrée (tépales ext. plus larges et arrondis chez les hybrides de jardin). Les 3 tépales internes (~ pétales), d'environ 8 cm de long, sont dressés au-dessus de la fleur, cachant partiellement le style pétaloïde à trois branches.
La couleur dépend du clone observé, allant de bleu violet à violet pourpre, de foncé à clair et même blanc. Les sépales peuvent être de nuance plus pourpre et plus foncée que les pétales et avoir une bordure plus claire, ou bien être de couleur uniforme.
Cet iris ne produit pas de graines (stérile).

(Pour le distinguer des vieux hybrides, on retiendra : les feuilles persistantes, les sépales étroits à marge pâle, une gamme de couleur très limitée et la stérilité.)

Variétés

Iris germanica kochii
Iris kochii
Aquarelle Frank H. Rounds.

On distingue chez Iris germanica de nombreux clones régionaux. Ces formes ont souvent été décrites initialement comme espèces distinctes :

'Vulgaris' : Pétales bleu violet. Sépales violet foncé, plus clair sur les bords, à onglets (cotés de la base des sépales) blancs veinés violet. Barbe blanche à pointe jaune clair. Bractée teinté de rouge.

'Caerulea' : Plus bleu que le précédent. Pétales bleu violacé. Sépales bleu violet à onglets blancs veinés de brun clair, barbe blanche à pointe orange clair. Bractées marquées de rouge.

'Kochii' : Variété de plus petite taille. (Nord de l'Italie).

'Kharput' : Pétales pourpre. Sépales pourpre foncé. Feuilles à fine marge pourpre. (Turquie).

'Sivas' : (Turquie).

'Akabadensis' : (Asie-Centrale).

'Nepalensis' (syn 'Atropurpurea', 'Purple King') : Pourpre foncé. Barbe blanc bleuté. Remontant. (Népal).

'Alba' : Petites fleurs blanches, à peine bleuté à la base des pétales. Sépales à onglets veinés de brun-vert pâle, barbe jaune clair. (Balkans).

'Florentina', (syn. Iris florentina) Iris de Florence : Rhizome plus parfumé. Feuilles plus glauques. Fleurs à tube non plus long que l'ovaire, blanches à peine teinté de bleu, à onglets veiné de brun-jaune clair. (Europe du sud).

Iris albicans se distingue par ses feuilles tournant sur leur axe longitudinal et non pas planes. Cet iris à 44 chromosomes reste considéré comme espèce distincte, sans raison convaincante. (Grèce, Albanie, rive adriatique de Yougoslavie et Italie, également anciens cimetières musulmans méditerranéens).

Origine et limite de l'espèce

Est-ce une espèce sauvage ou domestique ?

A la différence de toutes espèces de plantes sauvages, Iris germanica ne se rencontre jamais en population dans la nature mais seulement en des lieux ayant été habités ou cultivés par l'homme.

D'autre part il est stérile et ne se multiplie que par le rhizome !

Les Iris germanica que nous connaissons ne sont donc pas une bonne espèce sauvage mais d'anciens clones propagés végétativement.

Quels sont ses parents sauvages ?

Deux hypothèses peuvent s'envisager : il a une espèce sauvage ancestrale unique ou bien il en a plusieurs (origine hybride).
Dans tous les cas, il faut expliquer pourquoi il a 44 chromosomes alors qu'aucun iris sauvage fertile n'en a ce nombre.
Il faut en outre expliquer la diversité de ces plantes stériles multipliées par clonage.

1) Si c'est un hybride, c'est alors entre des espèces ayant l'une 40 chromosomes, l'autre 48. Il en aura hérité 20 d'un parent et 24 de l'autre, soit 44.
Une telle hybridation a très peu de chance d'avoir eu lieu dans la nature car les espèces parentes n'habitent pas la même région ni le même biotope. Par contre, dans un jardin la possibilité d'hybridation est réelle. D'autant plus que l'homme cultive des fleurs depuis des millénaires... Comme les hybrides sont parfois "remarquables", ils ont de bonnes chances d'être diffusés par l'homme.

La stérilité s'explique aisément par le fait que ses 20 + 24 chromosomes ne peuvent constituer des paires lors de la formation des gamètes.

La diversité des variétés s'explique sans doute en partie par l'existence de mutations somatiques.
Des variantes ont aussi put se former à plusieurs reprises, de façon indépendante : l'hybridation a put se faire dans plusieurs jardins, et même avec des parents à 40 et 48 chromosomes différents d'un jardin à l'autre...

2) S'il dérive d'une unique espèce, ce peut-être d'une espèce a 48 chromosomes avec perte de quatre.

La diversité ne peut alors avoir pour origine que les mutations somatiques.
Il est en effet difficile d'admettre la formation indépendante de plusieurs clones à 44 chromosomes à partir d'une espèce d'un nombre différent (48), à moins de savoir expliquer la perte dans toutes les lignées de 4 chromosomes et non pas de parfois 1 ou 2 ou 3 ou 5...

Les faux Iris germanica L.

Iris sauvages à 48 chromosomes :

Certains auteurs inclus dans Iris germanica des iris fertiles à 48 chromosomes. Nous sommes en désaccord total avec ceci.

Il faut réserver le nom I. germanica L. aux seuls iris à 44 chromosomes et ne pas y inclure d'iris à 48 chromosomes, car en raison de l'origine hybride vraissemblable de l'Iris germanica, assimiler l'un à l'autre revient à assimiler une espèce hybride à une de ses espèces parentes !

Exemple de faux germanica :
- 'Amas' (Iris amas, I. germanica var macrantha) : Pétales bleus clairs. Sépales bleu violet à onglets blancs veinés violet, barbe bleu pâle à pointe orange. Originaire de la région d’Amasia au nord de la Turquie. Utilisée dans l'obtention des iris à grandes fleurs, dits tétraploïdes, au début du XXe siècle.
- Iris mesopotamica Dykes
- Iris cypriana Baker & Foster

Iris horticoles :

Au XIXe siècle, les horticulteurs ont pris la mauvaise habitude d'employer le nom Iris germanica pour tous les iris barbus qu'ils vendaient, essentiellement des iris hybrides de I. pallida x I. variegata à 24 chromosomes. Cette mauvaise habitude a perdurée au XXe siècle avec les nouveaux iris horticoles issus du croisement de formes tétraploïdes des précédents avec les espèces à 48 chromosomes. Cette appellation indiscutablement erronée persiste malheureusement jusqu'à aujourd'hui... Dans la majorité des publications horticoles anciennes, il faut comprendre ce nom comme "Iris germanica hort". Il convient de les désigner sous le nom "iris groupe Barbata" ou simplement "iris de jardin".

P. Vigneron


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Société Française des Iris et plantes Bulbeuses (S.F.I.B.)
LES  POUMAROTS  32220  LAYMONT.